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Watchmen, Les Gardiens, Alan Moore (sc.), Dave Gibbons (dess.), DC Comics (Editions Zenda pour la version française), 6 tomes




Moore & Gibbons - Watchmen


C’est une histoire de super héros, c'est-à-dire des adultes qui se déguisent comme des enfants attardés pour faire le bien contre des méchants. La BD part de ce postulat de base de la plupart des comics, le prend au premier degré, et l’assume totalement (c’est même le but). L’action se situe en 1985 (c'est aussi la date de publication), aux Etats-Unis.




Les super héros ont vieilli. Ils n’ont pas de super pouvoirs, ce sont des hommes comme les autres, dont la vocation est née à la lecture de comics. On les appelle « les Gardiens» (Watchmen). La première vague de ces héros, apparus dans les années 1940, a en partie tombé le masque, seuls deux jeunes ont repris le flambeau, mais ils ont été remisés par une loi interdisant au gouvernement de faire recours à eux. Un seul dispose de pouvoirs surnaturels, après avoir été irradié. Il a permis aux Etats-Unis de gagner au VietNam et a fait dire :"Dieu existe, et il est Américain"...


Moore & Gibbons - Watchmen


Au début, l’assassinat du « Comédien », sans doute le personnage le plus trouble avec l’inquiétant Rorschach, met ce dernier sur la piste d’une conspiration qui viserait à éliminer tous les Gardiens (dans quel but ?).



Moore & Gibbons - Watchmen - le Hibou


Dans cette BD, les super héros représentent, à l’inverse des schémas habituels des comics, non pas tout ce qu’il y a de bien dans l’Amérique, ou les défenseurs des valeurs libérales et démocratiques, mais au contraire toute la mauvaise conscience et la part d’ombre de l’Amérique. Celle-ci est protégée par ses « Gardiens », certes, mais « who will watch the watchmen ? », qui gardera les gardiens ? (c’est une interrogation qui court tout au long de la série).



A travers des extraits de « mémoires » d’un de ces hommes, un éclairage différent est apporté, et est dénoncé le « fascisme » qui n’est jamais loin et menace en permanence la démocratie. Le combat pour la justice n’est jamais loin du totalitarisme. L’entretien d’une vision manichéenne de la réalité dans les mentalités (le Bien contre le Mal), qui rassure mais simplifie, qui évite de réfléchir et endort les citoyens, qui justifie tout ; mais aussi la violence (très présente), Hiroshima, le VietNam, l’usage de l’arbitraire d’une définition du Bien, nécessairement relative mais élevée au rang d’absolu, autant d’éléments que l’on retrouve dans cette BD.

Bref, enfin un comics où les super héros sont ambigus et peuvent être des "méchants"...


Le dessin est un dessin de comics (les auteurs sont des auteurs de comics) et les couleurs parfois criardes (bin oui, ça date des années 1980), ce qui peut rebuter au premier abord, mais la BD est servie par l’étude des personnages, son montage cinématographique, la façon dont sont agencées les cases sur les doubles pages, et les décalages/rapprochements entre textes et dessins. La traduction en français est assurée par le romancier Jean-Patrick Manchette.